[BG séquentiel]Lawreth El'Sheif Ibn Sheyeb

La voyante a l'oeil brisé

Première partie: La course

C'était jour de chasse aux cent-pointes. Minerva faisait sa toilette quotidienne perchée sur un muret et ne se doutait pas qu'elle était observée par quatre paires de yeux affamées. Tous faisaient parties d'un regroupement d'orphelin dont le malin Gargantua était le chef aidé de son bras-droit, Pantagruel. Le signal fut donné. Une pierre lancée atteignit le muret a deux poils de moustaches de Minerva. Celle-ci sauta au sol et entreprit de fuir suivit par les sales gamins.

Le chat noir se mouvait aisément a travers les passants, évitant les imposantes bottes de l'un, se faufilant entre les jambes de l'autre. Le premier gamin fut vite semé alors qu'il se heurta a Mirna, la garde.

-Dégage morveux, ordonna-t-elle en envoyant valser le gamin dans les déchets d'un coup dans la gueule.

Puis Minerva coupa sec au coin de la taverne, bondit par dessus les jambes d'un mendiant, se faufila sous les jupons des trois sœurs de joies occupées a séduire le vendeur de briquets Kardar en lui caressant la barbe. C'est en ces jupons que se perdit le plus petit, mais téméraire, des orphelins.

Et la chasse continuait pour Gargantua et Pantagruel, qui ne quittait Minerva des yeux. Celle-ci arriva bien vite au niveau du forgeron, qui résigné, se laissait tâter les muscles par Emerith le styliste effeminé.

-Hey! Mais c'est le gamin qui a volé mon livre de ferrailleur! s'écria le forgeron qui eut tôt fait d'attraper Pantagruel par le colet, le mettant ainsi hors course.

Il ne restait donc que Gargantua qui ne s'était laissé distancer pendant la course. Après avoir poursuivi le chat a l'extérieur, a l'intérieur et sur les toits des bâtisses, il arriva devant une imposante tente a la mode Kheijanne.

Le chat s'y était faufiler.

-Entrrre, gamin...

Deuxième partie: La voyante

Une étrange odeur flottait dans l'air alors qu'une fumée grisâtre s'échappait de la tente où s'était faufilée Minerva. La voix grinçante qui en était sortie ne pouvait qu'appartenir à la voyant à l'œil brisé. Gargantua, l'ayant jamais vue, ne savait d'où lui venait se pseudonyme, mais il avait déjà entendu d'étranges rumeurs sur son sujet. Sa curiosité gagnant sur sa peur, il entra.

Il vit tout d'abord le dos de la vieille femme. Elle était vêtu de nombres d'étoffes et de châles et tournait un rat sur le feu, d'où l'odeur et la fumée. Minerva et un second chat noir observait d'ailleurs le rat avec appétit. Un jeu de cartes aux étranges figures traînaient sur la table.

La voyante décrocha le rat de la broche, le séparant en trois en quelques gestes rapides et donna un morceaux à chaque chat.

-Voilà pourrr toi, mon beau Salem, tu le mérrrrites bien. Tiens Minerrrva, tu dois êtrrre affamé aprrès une telle course, dit-elle d'une voix mielleuse.

Puis elle se tourna vers Gargantua. C'est alors qu'il comprit la raison du pseudonyme. La voyante portait une imposante paire de lunettes dont l'un des verres était largement fissuré, donnant l'impression qu'elle n'avait pas deux, mais sept yeux par lesquels elle vous détaillait, disséquait, scrutait.

-Assied-toi, dit-elle sèchement au gamin, tire cinq cartes et dépose les devant moi.

Toujours par curiosité, le gamin s'exécuta, tirant cinq cartes du jeu de tarot. La voyante tourna la première carte: La justice.

-Voilà qui est étrrrange...

-Qu'est-ce qui est étrange, m'dame la sorcière, demanda le gamin.

-Je crroyais avoirr perrdu cette carrte, répondit-elle avec irritation en tournant la seconde carte: Le diable.

-Tiens tiens tiens...

-Quoi? Quoi!?

-La justice et la diable côte à côte est signe de conflits, dit-elle est tournant la nouvelle carte: la tour. Cela se passerra ici, continua-t-elle d'une voix lugubre.

-Qu'est-ce qui se passera ici?

La voyante fixait le gamin de ses sept yeux en tournant les deux dernières cartes: Le jugement et la mort.

-La guerrrre.

Troisième partie: Le fils

Assaillit de tourments et de scrupuleux songes, Lawreth résolu de se rendre sous sa tente où il y découvrit sa mère, la voyante à l’œil brisé, et un môme esgourdant les racontars de sa vieille harpie de mère. Ils rompirent leur entretient, le gamin dans une vivacité surprenante fit volte-face tandis que la vieille femme stria son fasciés d’une expression suspicieuse en voyant son fils apparaître en sept exemplaire.

-Kahim vous deux… souffla-t-il avec détachement, une pointe d’amertume dans sa voix en faisant les cent pas ne sachant où se mettre de corps et d’esprits.

-Débarrrasses et vas t’offrrrirr un rrrepas gamin. Te nourrrirr d'élucubrrrations sorrdides n’est nohem bon pourrr ton rrrégime.

Lawreth se pencha doucement sur le gamin, lui prit la main brusquement sans mal en y déposant quelques écus et s’assura de refermer ces petits doigts sur son argument. Convaincu ou soulagé, le bambin détalla sans en ajouter. L’atmosphère redevint silencieuse et lourde lorsque les clochettes suspendues à l’entrée cessèrent leur tintement après le passage du jeune voyou. Le fils, en proie à ses tourments, rôdait derrière la vieille femme en la sondant du regard pendant qu’elle rassemblait les cartes en un paquet dans un mouvement nerveux et excessivement lent. Elle ne prêtait même pas un seul de ses multiples œillades à Lawreth. Seules les oreilles de la voyantes se dressèrent, tiquant légèrement des paupières lorsque l’accalmie fut rompu.

-Dis moi ma mèrrre, depuis quand offrrres-tu grrratuitement tes serrrvices à un gamin?

-‘’Celui qui t'enseigne vaut mieux que celui qui te donne.’’

-C’est ton savoirrr que tu dilapides. Le savoirrr est rrrichesse, la rrrichesse est pouvoirrr. ‘’Ton secrret est ton sang ; si tu le laisses s'échapper, tu mourrras.’’

Il était coutume dans la famille d’offrir l’argumentation au travers de proverbes ancestraux. Ne laissant pas de temps à la réplique, Lawreth poursuivit :

-Un gamin n’a pas à se soucier de la guerrrre. Il n’aurrrait jamais dû en êtrrre inforrrmé.

-‘’ Mieux vaut une vérrité qui fait mal mon fils, qu'un mensonge qui réjouit.’’

-‘’Ta langue n'a pas d'os, tu la déforrmes comme tu veux’’, cracha-t-il, son exaspération en ébullition.

-‘’Ne fais jamais rrien dans la colèrre : hisserrais-tu les voiles dans la tempête?’’répondit-elle, amusée.

s’abandonna à l’humour léger de sa mère.

-Tu as rrraison, mèrrre. Le gamin qui n’a nul foyer, nul tuteurrr, nul instrrruction, ne peux trrrouvé sa forrrce que dans les connaissances flottant au grré du temps. ‘’Le temps serrra le maîtrre de celui qui n'a pas de maîtrre’’. La guerrre un parcourt que tu devras un jour emprrunter. Le fou y apprendrra, le sage attendrra.

La mère regarda fièrement les sept exemplaires de son fils, se leva et prépara le nécessaire pour le thé. Sa manoeuvre trop assurée et preste trahissait la satisfaction qu'éprouvait la femme à l'égard de la visée considérée de son fils.

Spoiler:

Sous la tente de la Voyante à l’œil Brisée qu’était Aaliyah, un fumet agréable d’épices et d’encens embaumait les lieux faiblement éclairée de chandelles rappelant le teint du crépuscule. À l’entré, des clochettes chantaient la présence timide du vent.

Une vieille femme kheijanne penchée sur ses instruments de divination, veillait comme elle l’eut toujours fait à percer le dessein du grand architecte Thoteb. Seulement, cette fois-ci, dans une cérémonie mystique, elle s’engageait à deviner ce que le destin réservait à son fils unique; Lawreth ibn Sheif.

Jour 1

Je m’enfonce toujours et encore plus loin dans le territoire du Très-Haut à dos de destrier. L’on m’a dit qu’une épreuve m’attendait, que ma valeur serait éprouvée dans ce milieu exigeant et désertique. La cadence effrénée du cheval qui m’emporte dans le désert ne me laisse aucun répit afin de me situer. J’ai les yeux bandés et ne vois que par les manœuvres hasardeuses de mon guide équin. Je m’agrippe fermement au pommeau de la selle sur laquelle je suis juché; tel un aveugle à son appui. On m’a promis l’Éveil au travers d’un rite lumineux, on a déposé à mes pieds l’épreuve de la dignité; le rite de passage. L’emprunterai-je? La seule conviction et l’unique intérêt que je porte au présent ce tourne vers mes possessions : ma gourde, ma toge, mes poignards et mon intarissable désir de survit. Mon cheval a ralentit sa procession, est-il exténué ? Je retire mon bandeau qui couvre mes yeux et je constate qu’autour de moi tout n’est que sable infini et que toutes les dunes sont jumelles.

Spoiler:

Jour 2

Que le Roi-Soleil me confronte de son regard cuisant et m’impose l’aridité de son royaume, je resterai debout devant lui. Je resterai debout et marcherai vers ma survivance. Le cheval qui m’emporta jusqu’ici n’était pas harnaché de brides car c’était lui le guide. Je m’en suis remis à cette réflexion afin d’en conclure qu’il saurait sans équivoque tracer son chemin instinctivement vers un point d’eau. Je le délivrai donc de sa selle et attendit qu’il réponde tacitement à mes besoins. Ainsi, je me réfugié à l’ombre d’un auvent rudimentaire que j’eus improvisé avec ma soutane dans un vallon des dunes que je fixai avec mes poignards. Les heures passèrent, m’intima avec force de rester éveiller pour garder un œil sur le cheval. Le marchand de sable l’emporta sur ma vigilance et me fit sombrer dans un sommeil repus et serein.

Spoiler:

Jour 3

À mon éveil, à ma grande surprise, mon compagnon n’y était plus. Enfin, c’est le témoignage que je fis lorsque je m’extirpai de l’abri temporaire que j’eus élaboré avec ma soutane, celle-ci s’étant effondrée sur moi durant mon sommeil. Mon réveil brusque et remuant je le dois à un lézard s’ayant logé dans mon entrecuisse en toute innocence. J’eu tôt fait de voir en lui, le baume de mon estomac se tordant de famine. Ce lézard, je l’ai poursuivit en butant, en chancelant épuisé jusqu’à ce que, résigné, je me laissai choir à genou face au vent dressant sa fureur insidieuse. Mes sens divaguaient. J’entendais grésiller le Roi-Soleil, ma vision était obscurcit en plein jour et tout mon corps était inlassablement parcourut de grands frissons de fraîcheur qui m’horripilait particulièrement. Le désert ne m’avalerait pas, le dernier chapitre de mon existence n’était point venu. Je le sus lorsque à bout de force, je me traînai au sommet d’une dune, le vent s’opposant avec insistance contre ma volonté. Au loin, jubilation, une oasis salvatrice.

Spoiler:

Jour 4-5

Enfin, la vision que j’eu de ce havre d’Adiya n’était pas qu’illusion. Je prêtai deux jours à cet endroit fécond où je consolai ma chair marquée par l’empreinte indélébile du Roi-Soleil dans ce bassin d’eau. Mon esprit en proie à un délire progressivement insoutenable, j’esseyai de maîtriser la faim qui me rongeait l’estomac et qui, elle, rongeait ma raison en m’entretenant à mi-voix avec moi-même pour finalement vouer mes paroles directement au Sithah et son Saint Créateur. Avant de fermer l’œil sur le cinquième jour, je caressait l’idée de revenir glorieux et digne en Najar’him par delà les préceptes du Sithah médiateur Thoteb.

" Le temps rrévèle tout : c'est un bavarrd qui parrle sans êtrre interrrogé. "

Spoiler:

Jour 6

Que mon mérite sois exhaussé, une caravane marchande eut tracée son dessein jusqu’au sanctuaire où je me trouvais. Les caravaniers découvrirent un homme dans un état second; la chair à vif par l’essence divine du Saint précepteur lumineux et la raison en cavale chevauchant le délire religieux. Suspicieux et inquiet, je me rappel que ces hommes se sont consulté d’un long regard avant de m’amener dans l’une de leur caravane. On me nourrit de galettes de tardha et on me rafraîchit d’une eau douce avant de m’inviter à me reposer durant le voyage du retour. Pendant que l’épuisement gagnait en lourdeur sur mes paupières, quelques choses masqua le soleil un moment par-delà l’ouverture de la caravane, quelques choses de flou dont je ne saurais encore identifié la nature. J’entendis un sens sans parole, un communiqué clandestin.

‘’Le rrrite du pasSsage est la voie que tu as choissZis d’emprrrunter. Tu ne pourrrras t’en délier qu’à ta morrrt. La vie est ton fardeau, tu devrrras t'en montrrrer digne. Bon voyage…’’

Jour 7

La cohorte de marchand tailla son chemin avec succès vers Najar’him. La vision de la Sainte m’emplis d’émoi en l’a retrouvant de mon regard changé. De ce voyage vers l’éveil, j’ai subis les examens de Sehk, j’ai senti l’œil de Nakh me jaugé, je me suis exposé à la justice d’Imkaj, j’ai vue Din’Ra mener à moi, au nom de mon salut, ses prospères fidèles et Adiya m’offrir la vie. Au nom du grand architecte Thoteb, je m’en remets au prochain chapitre. Qu’il m’entende car mon destin est en vain scellé. Qu’il m’entende car telle est sa volonté; car telle est son devoir. Je suis fils de Kheijan, je deviendrai fils du Royaume des Sables, je deviendrai l’élite et fidèle à son Roi. Que la lumière soit.